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Dreux (28100)

Émile Buré journaliste, ami de Clémenceau

Je vous ai entretenu, dans deux chroniques de 2019, de deux journalistes drouais du début du XIXème siècle : Alexandre Dujarier et Mathurin Brisset. Le premier était directeur du journal « La Presse ». Il mourut en 1845 à 29 ans lors d’un duel au pistolet. Le second fut surtout l’un des plus prolixes auteurs dramatiques et romanciers de la première moitié du 19ème siècle. Il écrivit une centaine d’œuvres, appréciées de Victor Hugo. Au tournant des XIX et XXèmes siècles, un autre Drouais fut l’un des plus grands journalistes de son temps. 

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Par Marine BORGET - Le 02 mars 2023

Émile Clément Charles Buré, né le 6 mars 1876, était le fils de Charles Louis Buré, marchand mercier à Dreux. Il commença ses études au collège de Dreux (1883-1887) et les poursuivit à Paris au lycée Janson-de-Sailly. Il prépara le concours d'entrée à Saint-Cyr. Admissible au concours en 1896, il abandonna bientôt son projet de devenir officier.

C'est avec humour qu’il évoquait ses souvenirs de lycéen : « Pour éviter à nos professeurs une perte de temps, nous écrivions sur les copies qui paraissaient dignes de retenir leur attention, ces mots : Prière de lire ».

Étudiant, il fréquentait la jeunesse des cafés du Quartier latin. Il devint socialiste, et dreyfusard. Ayant pris la voie du journalisme, Emile Buré, vers 1900, collabora à la « Vie socialiste » de Francis de Pressensé. Il se fit remarquer par Clemenceau et fut embauché au journal « l’Aurore » comme chroniqueur parlementaire. Clémenceau était le véritable patron politique de ce journal fondé en 1897 et où avait paru, en 1898, le pamphlet d'Émile Zola, « J'accuse ».

Lorsqu'en mars 1906 Clemenceau devint le ministre de l'Intérieur du cabinet Sarrien, il demanda à son chroniqueur parlementaire de devenir son chef de cabinet. Ayant appris à connaître le Parlement de l'extérieur en tant que journaliste, Émile Buré observa alors le jeu politique de plus haut, pendant 5 ans, en tant que chef de cabinet de plusieurs ministres successifs.

Clemenceau le prit en amitié. Buré le lui rendit bien puisqu’il lui resta fidèle jusqu’à sa mort en 1929. Le surnom de « tigre » porté par Clemenceau dans la dernière partie de sa vie lui fut donné par son jeune collaborateur. Lorsque Buré entendait s’approcher Clemenceau, il avait l’habitude d’alerter ses collègues par cette exclamation « Taisez-vous, le tigre monte ! ». Et, de la salle de rédaction, ce surnom gagna le monde politique et lui resta accolé à celui de « Père la Victoire ».

Entre les deux guerres, Émile Buré devint le directeur de plusieurs journaux dont « l’Ordre » qu’il fonda en 1929. Ses différentes publications étaient de sensibilités différentes. Buré affirma : « Je ne suis ni de droite ni de gauche. Je vais droit sur mon chemin. Qu’il me soit donc permis de mettre en garde ceux de droite comme ceux de gauche contre la passion partisane qui les tourmente, au point d’obnubiler complètement leur intelligence, leur jugement. »

Pendant la Seconde Guerre mondiale Émile Buré s’exila aux États-Unis. À son retour, il tenta de relancer son journal « l’Ordre » mais les temps avaient changé. Deux ans plus tard, faute d’argent, il dut se résoudre à mettre la clef sous la porte. Il en fut terriblement blessé et, frappé d’une grave dépression nerveuse, il mourut le 31 mai 1952 à Saint-Mandé. 

Dans le monde journalistique, Émile Buré, « terreur des politiciens », fut l’un des plus grands chroniqueurs politiques de la première moitié du vingtième siècle. 

Pierlouim

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