La science la plus pointue vient au service de l’Histoire pour nous révéler les mystères de la boîte mémorielle découverte en juin 2021 au pied de la statue de Jean de Rotrou, place Rotrou, à Dreux.
Le hasard afait ressurgir un pan du passé de la ville de Dreux. À l’occasion des travaux engagés Place Rotrou en 2021, une boîte mémorielle a été trouvée sous la statue du dramaturge drouais. Elle avait été placée là en 1866 à l’occasion de la pause de la première pierre du monument. Devant ce trésor tout droit sorti du passé, Damien Chantrenne, conservateur du musée d’art et d’histoire de Dreux, conscient de l’importance et de la chance inestimable d’une telle découverte, a saisi le Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France (C2RMF) installés au Louvre à Paris, afin que la boîte soit explorée, étudiée et restaurée dans les règles de l’art avec les plus grandes précautions et les moyens scientifiques les mieux adaptés. Loin de sa terre natale et de son histoire, la boîte mémorielle a fait l’objet de toutes les attentions. « Toutes les compétences du centre d’archéologie ont été mise à profit pour explorer la composition et l’intérieur de la boîte avant l’ouverture. Le service de la conservation préventive, le premier à entrer en scène, a pris en charge la boîte et l’a conditionnée pour qu’elle se conserve correctement car elle a connu une période d’enfouissement d’au moins 150 ans. Sortie brutalement du sol, elle a subi des traumatismes avec une rupture de son climat. Des mesures ont été prises pour lui restituer une poche de conservation la plus proche possible de son environnement durant sa période d’enfouissement à savoir 90 % d’humidité afin de ne pas créer d’instabilité, et la conserver grâce à des sachets de gel de silice. Une étude préalable a été menée pour lever, les unes après les autres, les énigmes de cet objet en forme de parallélépipède. Un examen par fluorescence X a permis de découvrir que la boîte était composée d’une feuille de plomb repliée trois fois sur elle-même. Un long coté et deux petites feuilles de plomb sont soudés avec un alliage plomb et étain. On se trouvait en présence d’un matériau toxique nécessitant des mesures de sécurité pour protéger les personnes en contact avec l’objet. Le plomb étant un matériau très dense, il est difficile à radiographier. Nous avons quand même réussi à avoir des images de l’intérieur de l’objet. De plus, nous avons constaté qu’il y avait eu une tentative d’effraction pour ouvrir cette boîte lors de sa découverte laissant une petite brèche sur le côté, une aubaine qui nous a permis de glisser un endoscope pour observer l’intérieur de la boîte et découvrir qu’il s’y trouvait un autre objet en métal extrêmement corrodé, lui aussi en plomb. Cela nous permis de comprendre à quel type de spécialiste il allait falloir nous adresser pour que cet objet du patrimoine, destiné à rejoindre une collection d’un des musées de France, soit traité par des personnes habilitées. Cette boîte a un dispositif complexe qui a été agencé d’une manière précise et qui reflète toute une série de gestes et de décisions qui ont été prises en 1866 pour transmettre un message », détaillait Sarah Busschaert, conservatrice à la filière archéologie au C2RMF, en présence de Fouzia Kamal, adjointe au maire de Dreux, chargée de la culture. Fouiller et découvrir sans détruire tel a été le dilemme des chercheurs. La première intervention fut d’ouvrir la boîte en plomb. Elle a révélé plusieurs contenants : un coffrage en bois gorgé d’eau, un cylindre en plomb qui contenait lui-même un autre cylindre en verre. Le cœur du mystère se trouve là. Il s’agit d’un parchemin qui n’a pas encore pu révéler tous ses secrets car il doit encore être conservé dans un réfrigérateur pendant quelques mois afin d’assurer le maximum de chances de pouvoir déchiffrer son message », expliquait Julie Schröter, restauratrice de métaux. « Il s’agit probablement d’un document administratif officiel provenant d’un conseil municipal de l’époque. Un hommage au souscripteur de la statue est peut-être évoqué. Qu’importe, le contenu, l’intérêt majeur est la transmission d’un patrimoine historique. Une nécessaire transmission aux générations futures », concluait Damien Chantrenne.