Après Pierre Adornier, professeur au lycée Rotrou de Dreux, voyons un autre homme de lettres, élève de ce lycée drouais.
Jean Hougron, né en 1923 à Colombelles (Calvados), suit pendant son enfance les mutations de son père cheminot. Il arrive à Dreux en 1936 avec ses parents. Il a 13 ans et intègre le pensionnat Saint-Pierre, tenu par les Frères des écoles chrétiennes. Pendant sa scolarité, il fait partie de l’équipe de football du pensionnat, et passe avec succès le brevet. Il montre déjà une grande prédilection pour les arts littéraires. On ne peut en dire autant des mathématiques. Il n’est pas et ne sera jamais matheux. Il quitte « Saint-Pierre », qui ne prépare pas encore au bac, pour le collège Rotrou. La « philo » le séduit d’emblée. Il lit énormément et s’intéresse à toutes les théories modernes. Marcel Dessal, son professeur d'histoire, lui dira, en 1964, qu'il fut son meilleur élève. Après le bac, passé avec brio surtout en philosophie, il fait des études de droit à Paris.
Jean Hougron revient à Dreux pour donner, de 1941 à 1945, dans son ancien pensionnat Saint-Pierre, des cours d'anglais et d'éducation physique, pratiquant l'athlétisme à l'Alliance drouaise.
Après la Libération, et 3 mois de service militaire, il fait un stage d’un an dans une maison d'import-export à Marseille. Il publie alors, dans une revue marseillaise, des récits de roman noir. Son employeur l'envoie en Indochine en août 1947. Il y part par goût de l'aventure, du risque calculé et dans le but d'y écrire plusieurs romans. Il déclare avant de partir à ses amis : « vous entendrez parler de moi ».
L'aventure commence : car il part du principe que pour écrire vrai, il doit vivre avec les indigènes (le Vietnam était encore colonie française d’Indochine, les colons français utilisaient alors ce terme « d’indigène »), observant, comme il observait à Dreux, pénétrant la psychologie si particulière de l’oriental.
De ces 5 années aventureuses et exotiques en Indochine, Jean Hougron prend quelques milliers de pages de notes qui lui fourniront la matière du cycle romanesque « La Nuit indochinoise » dont il publie le 1er volume « Tu récolteras la tempête » en 1950. ». Il obtient un succès considérable, atteignant un tirage de 500.000 exemplaires.
Sa vaste fresque de l'Indochine française le révèle au public et se voit couronnée en 1953 par le Grand prix du roman de l'Académie française. Dans sa nouvelle « Retour », publiée en 1954, il imagine que, devenu richissime grâce à ses affaires en Indochine, il fait son retour à Dreux (appelé Lourdan) et demande au notaire de la ville la main de sa fille, celle-ci lui ayant été refusée auparavant du fait de sa pauvreté, puis renonce à l'épouser et part vivre à Paris tandis que sa fiancée se suicide.
En 1956, son roman « Je reviendrai à Kandara » est adapté au cinéma.
En 1964, il écrit : « Histoire de Georges Guersant », fortement teinté d'autobiographie, où il présente une vaste fresque de la vie sous l'Occupation allemande dans une ville fictive du nord de la France ; on y reconnaît facilement Dreux, des personnalités drouaises et des événements spécifiques à la ville où il vivait à cette période. Pour apaiser les esprits, Jean Hougron déclare : « C'est un roman où l'imagination a sa large part et il convenait que les Drouais le sachent... ». Son roman est sélectionné pour le prix Goncourt. Le prix ira à « L'État sauvage » de Georges Conchon. En 1981, il intente un procès à Françoise Sagan pour plagiat, reconnaissant dans « Le chien couchant » des points communs avec sa nouvelle « La vieille femme ».
Jean Hougron meurt le 22 mai 2001, à Paris 15e. Il n’y a pas de Rue « Jean Hougron » à Dreux.